Pauline Lisowski

A propos de l'expositon "... m'étant égaré en chemin"

2025

Artiste, paysagiste et vidéaste, Olivier Marty développe un processus de travail dans un aller-retour entre des territoires qu’il parcourt et son atelier. Durant ses déplacements, il prend des notes graphiques et enregistre des plans vidéos qu’il associe ensuite de retour chez lui. Sa recherche picturale tend à rendre visible l’impression d’une étendue, d’un espace où le regard peut circuler.

A l’espace d’art Camille Lambert, il réunit des séries d’œuvres présentant des rythmes entre une surface blanche et une diversité de signes colorés. Ses dessins de la série Pinède de Brusc présentent une diversité de hachures exprimant l’ombre et la lumière, la recherche d’un équilibre entre le plein et le vide. Ils traduisent une relation avec le vivant, les sensations d’être en contact avec le vent et l’influence de celui-ci sur le corps et sur les autres éléments du paysage. L’artiste considère le dessin comme une pratique de gammes, où à un moment donné le paysage se présente à lui comme le lieu décisif face auquel se poser et dessiner. Dans la série La Risle, dessins au crayon de couleurs sur papier, les couleurs traduisent la lumière et ponctuent la feuille, inspirant également un mouvement et un déplacement du regard.

Présentés au sol, légèrement surélevés sur un socle bas, des dessins de la série A marée basse invitent à songer à un paysage de galets face auxquels nous pouvons ressentir une sensation de proximité avec les éléments dessinés. Sur un mur, en dialogue avec cette série, sa grande peinture est constituée d’une diversité de signes, tel un vocabulaire graphique semblable à une légende de carte : D’un côté, une recherche d’un vide et de l’autre une superposition de touches et de formes colorées, suggérant la laisse de mer. On imagine alors le processus lent de la marée.

Le parcours de l’exposition invite à une promenade à la rencontre d’éléments qui ont captivé le regard de l’artiste. Face à ses toiles, le regard circule en étant constamment attiré par les couleurs qui interagissent entre elles. Olivier Marty privilégie une recherche de spécialité. Il compose ses peintures par strates, les structure à la manière dont un paysagiste organise l’espace et fait avec l’existant, le transforme en associant plantations et circulations. Certaines résultent d’un processus lent de recouvrement, d’effacement et de surgissement de formes, tels des souvenirs qui remontent à la surface. Parfois, une couleur domine tout en laissant apparaitre les traces de gestes picturaux qu’elle recouvre. Des indices de paysages urbains se lisent également dans trois dessins au crayon graphite sur papier. Telles des prises de notes de ses observations, ces travaux sont à la limite de l’esquisse et de l’ébauche. A la fois équilibrés sur la page, très construits et spontanés, ils révèlent l’expérience d’une attention aux rivières Dordogne et Vézère dans le cadre d’une résidence.

Ses céramiques qu’il nomme Jardins ont la particularité d’être à l’échelle de la main, comme s’il était possible d’emporter un fragment de jardin avec soi : une manière de se souvenir d’un moment d’attention à un détail de végétation ou à des associations de plantes aux nuances colorées.

Il traduit son observation des pépinières dans des peintures et des monotypes où il suggère la régularité de plantations. L’artiste agence sa toile en plusieurs parties et travaille par couche de peintures, révélant ainsi le parcellaire et les limites de terrain.

La musique participe à l’expérience picturale de l’artiste. Deux vidéos sont présentées et invitent à prendre le temps de découvrir les paysages qu’il a parcouru. Dans celles-ci, la composition musicale s’ajoute aux plans filmés telle une interprétation de la traversée du paysage.

Ainsi, l’exposition invite à un cheminement du regard d’une densité de signes et de surfaces colorés à des espaces de respiration propices à la méditation et un voyage mental.

Pauline Lisowski


Ce texte a été écrit pour la revue Slash, en janvier 2025